Stéphane Mbia fait l’objet d’une agression à l’avenue Kennedy
À peine quelques heures après leur arrivée à Yaoundé, les Lions indomptables, auteurs d’une
performance en Coupe du monde des plus désastreuses, avec 3 défaites consécutives, ont eu
l’occasion de jauger l’état d’esprit des Camerounais, bouleversés par la déculottée de leur équipe
chérie, dernier rempart de l’unité nationale leur procurant de temps à autre des raisons d’être fiers
d’être Camerounais. Après Alexandre Song en 2012, ce fut au tour du sociétaire de FC Séville, de se
faire agresser en pleine journée à l’avenue Kennedy, par ses compatriotes. Selon des témoignages,
ses agresseurs, commerçants à cet endroit pour la plupart, lui auraient pris sa montre et une chaîne
de valeur. Des témoins rapportent qu’en effet « Stéphane Mbia passait dans un gros véhicule noir.
Malheureusement pour lui, ses vitres étaient baissées ». Alors, « quatre jeunes hommes se sont
approchés pendant qu’il roulait lentement à cause de l’embouteillage. Ils lui auraient demandé le
“farotage” et comme visiblement il aurait refusé, ils ont commencé à scander : “voici Mbia, voici
Mbia” ». C’est ainsi que le véhicule du joueur a été envahi et qu’il a été séquestré par une marée
humaine. Abandonné par ses amis qui étaient avec lui dans le véhicule et qui auraient pris la fuite,
l’agressé aurait été « sauvé » par un élément du BIR (Bataillon d’intervention rapide), deux militaires
et un gendarme de passage audit endroit, qui ont usé de tous leurs atouts musculaires pour le sortir
de la foule qui le retenait prisonnier et réussis à le mettre dans un taxi, abandonnant son véhicule.
Voilà un fait symptomatique d’une société plongé dans une dérive complète. Une société dont les
membres qui ne se retrouvent plus dans leurs idoles d’hier, finissent par les agresser physiquement.
Hier, source de joie et de bonheur pour la majorité des Camerounais, les Lions indomptables sont
aujourd’hui source de dérision. Comment expliquer une telle situation ? Les causes d’un tel geste ne
sont pas lointaines. Déjà sur les médias sociaux, Facebook en particulier, les Camerounais avaient
commencé à agresser verbalement les membres de cette équipe en les affublant de toutes sortes
d’anathèmes. Il n’y a qu’à faire un tour pour évaluer l’ampleur de la rancœur des Camerounais face
aux performances de leur équipe. Cette agression n’est que la continuation de ce qui avait déjà
débuté sur les réseaux sociaux, surtout depuis l’affaire des primes que les médias pour la plupart,
ont malheureusement relayé en créant une confusion générale dans l’esprit des masses. Le résultat
était visible sur ces réseaux sociaux : « Ramenez notre/Bring back our money » ou encore « Venez
rembourser nos 56 millions/Bring Back our 56 millions ». Donc, en s’attaquant à Stéphane Mbia en
lui demande de « faroter » et face à son refus, ces derniers ont estimé que c’étaient de leur droit de
réclamer une motivation financière. Car, dans leur inconscient ou encore dans l’imagerie populaire,
les primes collectées avant leur départ pour le mondial n’étaient pas méritées. D’où l’immobilisation
du véhicule de Mbia et tout ce qui en a suivi. Résultat : en plus de l’agression et de la séquestration
d’un individu, un trouble à l’ordre public a été orchestré paralysant la circulation sans que les forces
de l’ordre n’aient le temps de réagir. Pire, les auteurs d’un tel trouble ne seront pas inquiétés. Voilà
la société dans laquelle nous vivons.
Ce que doivent comprendre les Camerounais c’est que bien au-delà des émotions et des passions
soulevées par le football, il reste d’abord une affaire de sport. Et qui dit sport, dit fair-play. Nous
aussi à une époque, avons infligé de cinglantes défaites à bon nombre de sélections nationales,
créant chez eux des douleurs et une frustration hors du commun. Avons-nous oublié le Nigeria, le
Mali, le Brésil ou encore la Côte d’Ivoire chez eux ou des Ivoiriens, ne réalisant pas le retournement
de situation, étaient restés cloués au stade toute une nuit après la rencontre ou étaient conduit
à l’hôpital suites aux buts de Webo. Nous n’avons pas participés à une Coupe du monde et à une
Coupe d’Afrique et pourtant à l’époque personne n’a été ému. Alors pourquoi de tels extrêmes ?
Si le football, avec sept participations au mondial, n’a jamais développé le Cameroun, ce n’est pas
aujourd’hui que cela va changer. On se serait attendu à des manifestations face à l’absence d’eau
potable à Yaoundé durant des années, face aux meurtres en série de Mimboman qui ont repris
de plus belle, il y a un mois, ou encore au chômage sans cesse croissant, un tunnel dont on ne
voit jamais le bout, etc. Et ce n’est pas la demande d’enquête adressée au Premier Ministre par
le Secrétaire General de la Présidence de la République du Cameroun qui viendra solutionner les
maux « holocaustiques » du football Camerounais, car c’est un grand corps malade peut être à
l’image de son pays.