C’est Barack Obama, saisissant les deux chambres du parlement américain, qui a informé l’opinion publique de l’envoi par son pays de 300 soldats américains sur le sol camerounais pour aider l’armée à combattre Boko Haram.
Pis encore : 90 de ces militaires sont à Garoua depuis le lundi 12 octobre 2015 et le président de la République n’a pas jugé important d’en informer les Camerounais.
Le communiqué publié par la Maison Blanche est sans équivoque : ce déploiement se fait en accord avec les autorités camerounaises. C’est le lendemain de l’annonce de Barack Obama que le secrétaire général de la présidence de la République a signé un communiqué qui informe l’opinion publique de ce qu’elle sait déjà. Ce qui signifie que pendant trois jours, le président de la République a caché à ses compatriotes qu’un contingent d’une force armée étrangère a été invité dans le pays pour des opérations militaires, fussent-elles à leur bénéfice.
Rien n’indique que sans la déclaration de Barack Obama on aurait été tenu au courant de cette décision de souveraineté sans précédent dans l’histoire de notre pays.
Cela nous rappelle que le 17 mai 2014, en pleine conférence de presse à Paris, alors que rien ne le laissait présager, alors qu’il était simplement aller prendre part à un sommet sur la sécurité voulu par François Hollande, Paul Biya avait, en une phrase, prononcé une déclaration de guerre du Cameroun contre Boko Haram. A 6 000 km de Yaoundé. Il n’y a pas jusqu’aux membres de la délégation qui l’accompagnaient qui n’aient été surpris par ce coup de théâtre, même si la secte venait de prendre des otages chinois. Il n’y a pas beaucoup de commandant en chef capable d’une telle expatriation de ses pouvoirs régaliens. Sans doute sous l’émotion et sous le choc de ces « gens qui attaquent à minuit quand on dort » et qui « viennent en centaines alors que les nôtres ne sont qu’une dizaine », Paul Biya a annoncé une décision à laquelle il ne s’était pas lui-même préparé.
Mais le déploiement de 300 soldats américains au Nord-Cameroun est l’aboutissement d’un processus initié par le gouvernement camerounais et qui ne s’est décidé qu’au bout de négociations. Pourquoi n’avoir pas informé les Camerounais dès le lundi 12 octobre, jour d’arrivée des 90 premiers soldats américains ? Le conseil des ministres tenu jeudi 15 octobre à Etoudi n’a pas évoqué cette question, comme si même les membres du gouvernement sont indignes de savoir. Si la guerre est pour nous une situation inédite, on sait en revanche qu’elle ne peut être gagnée que dans une unité nationale et un consensus socio-politique robuste. Le parlement, les leaders de partis politiqueset les partenaires sociaux ne demandent pas forcément à être dans le secret des négociations militaires, mais dans le respect de ce qu’ils représentent une partie du peuple souverain au nom duquel cette guerre est menée.
réussir à obtenir un appui militaire américain. Le président nigérian s’était rendu à Washington pour la même cause en juillet dernier, il n’était rentré qu’avec 2,1 milliards de dollars, prêtés par la Banque mondiale, pour la reconstruction du nord-est de son pays. Paul Biya a aussi montré à la France, son alliée de toujours, que sa diplomatie est capable de drainer d’autres amitiés dans le monde occidental.